Œuvres complètes
- psychanalyse - vol. IX : 1908-1909
Analyse de la phobie d'un garçon de cinq ans (Le petit Hans)
Remarques sur un cas de névrose de contrainte (L'Homme aux rats)
Œuvres complètes - psychanalyse -
vol. IX : 1908-1909
Phobie et névrose de contrainte
Analyse de la phobie d'un garçon de cinq ans (Le petit Hans)
Remarques sur un cas de névrose de contrainte (L'Homme aux rats)
Dans cet ouvrage paru trois ans après la publication des Trois essais sur la théorie de la sexualité infantile, Freud prend pour objet d'étude la phobie et ses manifestations d'angoisse dans la vie quotidienne d'un enfant de trois ans qu'il nomme « le Petit Hans ». Cette analyse deviendra un des grands cas de la psychanalyse et fera l'objet de nombreuses lectures critiques. Sa particularité réside dans le fait que Freud est en quelque sorte assisté par le père de l'enfant Max Graf, musicologue réputé et membre de la Société psychanalytique du mercredi -devenue par la suite la Société psychanalytique de Vienne-. Fervent partisan de la psychanalyse, M. Graf est un ancien confrère de Freud qui a consigné dans des notes abondantes et précises ses propres observations sur la sexualité de son fils. Tout à fait initié à la technique psychanalytique, le père consigne les paroles, attitudes et les détails de la vie de son fils de ses trois ans à ses cinq ans.
C'est en janvier 1908 que Freud entame cette nouvelle étude, dans ce début de siècle, il intervient dans le paysage culturel de l'époque d'une manière tout à fait innovante car il donne la parole à des sujets qui ne l'avaient pas ; la femme hystérique et l'enfant de quatre ans en demandant à ce que l'on traite leurs déclarations avec le plus grand soin. Il dira par exemple « je ne partage pas la vue présentement en vogue selon laquelle les dires des enfants seraient totalement arbitraires et non fiables. Il n'y a absolument pas d'arbitraire dans le psychique ; la non-fiabilité dans les dires des enfants provient de la surpuissance de leurs fantaisie, comme la non-fiabilité des dires d'adultes provient de la surpuissance de leurs préjugés. D'ordinaire, l'enfant non plus ne ment pas sans raison et il a, dans l'ensemble, d'avantage de penchant à l'amour de la vérité que les grands. » (p.91)
Freud traite donc avec un grand respect les dires de ce petit garçon qu'il considère en quelque sorte comme un théoricien de la sexualité. Il questionne d'ailleurs en introduction à cet essai « devrait-il donc être impossible de connaître par expérience immédiate sur l'enfant, dans toute sa fraîcheur de vie, ses motions sexuelles et formations de souhait qu'avec tant de peine, chez celui qui a pris de l'âge, nous exhumons de leurs ensevelissements et dont nous prétendons en outre qu'elles sont le bien commun constitutionnel de tous les hommes et ne font chez le névrosé que se montrer renforcées ou distordues ? » (p.6) De la même manière que l'adulte cherche à se débrouiller avec la bisexualité par exemple en usant d'un certain nombre de théories qui lui conviennent, l'enfant lui aussi recherche des solutions aux énigmes que la vie lui pose si précocement.
Épicrise
Après la transcription fidèle des écrits du père sur le petit Hans, Freud annonce l'orientation de son travail d'investigation : « c'est dans trois directions que j'aurai maintenant à examiner cette observation du développement et de la résolution d'une phobie chez un garçon qui n'a pas encore cinq ans : dans quelle mesure conforte-t-elle les affirmations que j'ai avancées dans les « Trois Essais sur la théorie sexuelle » (1905) ; deuxièmement qu'est-elle en mesure d'apporter à la compréhension de cette forme de maladie si fréquente ; troisièmement, quel gain peut-on éventuellement en tirer pour l'élucidation de la vie d'âme enfantine et pour la critiques de nos visées éducatives ? » (p.90)
« Pendant l'analyse d'un cas de maladie, on ne peut pas acquérir une impression qui fasse clairement la structure et le développement de la névrose. C'est l'affaire d'un travail synthétique auquel il faut se soumettre ensuite. Si nous entreprenons cette synthèse pour la phobie de notre petit Hans, nous partons de la description de sa constitution, de ses souhaits sexuels directeurs et de ses expériences vécues jusqu'à la naissance de sa sœur, description déjà donnée antérieurement.
L'arrivée de cette sœur lui apporta diverses choses qui dès lors ne le laissèrent pas en repos. Outre d'abord une part de privation, au début une séparation temporaire d'avec la mère et puis, ultérieurement, une diminution durable de sa sollicitude et de son attention, qu'il dut s'habituer à partager avec sa sœur. En deuxième lieu, une revivification de ses expériences vécues de plaisir provenant des soins reçus comme enfant, suscités par tout ce qu'il voyait la mère faire avec la petite sœur. De ses deux influences résulta une intensification de son état de besoin érotique qui commençait à manquer de satisfaction. Par la fantaisie selon laquelle il a lui même des enfants, il se dédommage de la perte que sa sœur lui avait causée, et aussi longtemps qu'il pu effectivement jouer avec des enfants - dans sa maison de vacances -, sa tendresse trouva une dérivation suffisante. Mais, revenu à Vienne, il fut de nouveau solitaire, attacha toutes ses revendications à la mère et souffrit d'une privation supplémentaire, car il avait été banni de la chambre à coucher des parents depuis l'âge de quatre ans et demi. Son excitabilité érotique intensifiée se manifesta désormais en fantaisies qui, dans sa solitude, faisait surgir les compagnons de jeu de l'été, et en satisfactions auto-érotiques régulières par stimulation masturbatoire de l'organe génital.
Mais, en troisième lieu, la naissance de sa sœur l'incita à un travail de pensée qui, d'une part, ne pouvait trouver de solution et qui d'autre part, l'empêtrait dans des conflits de sentiments. La grande énigme commença à se poser pour lui : d'où viennent les enfants ? » (p.117)